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La musique pour le changement

La musique pour le changement

Je suis arrivé au Malawi en Août 2010 pour le service missionnaire. Après presque trois mois d’apprentissage de l’anglais à Lusaka, en Zambie, j’avais été affecté à la paroisse de Lirangwe. Très vite je m’étais familiarisé au Chichewa, la langue locale, qui m’avait permis d’entrer en contact avec la réalité missionnaire du milieu. Le contact direct avec les jeunes m’avait fait comprendre qu’il était nécessaire de concevoir une nouvelle approche pour la pastorale juvénile. Le Malawi n’est pas aussi pauvre qu’on le pense; en fait une conception s’est transmise de génération à génération, qui fait croire que être malawite signifie être pauvre. Cela, malheureusement, bloque tout esprit d’initiative chez les jeunes, qui se croient condamnés à être pauvres. Et comme conséquence, on constate chez eux une certaine paresse, qui finalement donne l’impression qu’ils sont irresponsables.

En 2012, après mon ordination sacerdotale, je suis rentré dans la même paroisse. Comme j’étais le chargé de la pastorale juvénile, j’avais senti qu’il nous fallait trouver une approche nouvelle pour attirer les jeunes. C’est de là qu’est né Metanoia, un groupe de jeunes dont l’objectif était de mettre fin à l’esprit de pauvreté, paresse et irresponsabilité. En fait, « Metanoia » signifie changement ou conversion. Le nom du groupe a été adopté par tous, comme une volonté, de la part de nos jeunes, de voir  la vie différemment. Le slogan choisi était « pauvreté zéro, paresse zéro, irresponsabilité zéro ».
Nous avions organisé certaines activités comme le camp des jeunes, moment privilégié de prière et d’enseignement de nos jeunes; la formation dans divers domaines de la vie, les retraites, quelques initiatives d’auto-prise en charge économique comme les travaux champêtres ; des moments de divertissements comme le sport, la danse, le théâtre, etc. Ainsi, de chaque activité s’est formé un groupe différent : Metanoia youth council, Metanoia vocation group, Metanoia football and  netball clubs, drama group, training group.

En 2014, lorsque les comboniens du Malawi et de la Zambie avaient fêté les 40 ans de leur présence missionnaire, une idée m’était venue en tête d’adapter l’un des chants de Comboni de lingala en chichewa. Alors que je l’avais enseigné à la chorale, griffonnant sur les quelques notes autodidactes de la guitare, cela a réveillé la curiosité des jeunes, qui avaient découvert que je chantais bien et ils m’avaient encouragé. Après la fête, j’avais adapté un autre chant à la langue locale, puis petit à petit j’avais commencé à prendre le risque et commencer à composer de petits chants et cela avait bien fonctionné. Finalement chanter était devenu une passion pour moi. Nous avions créé un petit groupe, qui s’était agrandi, c’était la première chorale Metanoia de la paroisse. Puis nous avions créé un orchestre pour entretenir les jeunes, la Metanoia band. Ensuite, nous avions commencé à enregistrer nos chansons et à les vulgariser dans d’autres paroisses et diocèses.

La curiosité des gens grandissait de plus en plus puisque la tonalité de nos chants semblait une nouveauté, tout un mélange du Congo-Malawi. En plus, l’utilisation de la guitare était pratiquement nouvelle dans cette zone. Avec l’appui du conseil provincial, quelques instruments de musique avaient été achetés et bénis par l’Archevêque de Blantyre. Metanoia était alors devenu un outil d’évangélisation à travers les chants. Beaucoup de jeunes, même non catholiques s’y sont intéressés et de là, avait commencé toute une philosophie de réintégration et orientation des jeunes. Beaucoup se sont réconcilié avec Dieu à travers les sacrements de mariage et autres; bon nombre  de jeunes se sont engagés dans la vie religieuse, certains autres avaient repris l’école et l’apprentissage des métiers, etc.

Les jeunes sont devenus le centre de référence pour la pastorale juvénile et liturgique. L’animation des célébrations liturgiques, l’enregistrement des chants (audio-vidéo), les concerts religieux faisait partie de mon agenda pastoral jusqu’à ce qu’en 2016 quand j’avais été envoyé à Rome pour faire le Master en Philosophie en vue d’enseigner au Postulat. Lorsque le provincial m’avait approché pour me faire la proposition, la tentation de dire non était grande, mais en réalité le sens d’abnégation et la joie de faire une autre expérience l’avaient emporté sur la petite tentation. Je devais partir, laissant les jeunes inquiets mais pas désespérés, car tout était fait pour assurer la continuité des activités. Ils étaient bien outillés pour le faire ; aujourd’hui ils continuent de le faire avec l’aide des autres confrères.


De Lilongwe/Malawi
P. Jean-Marie Noël Munketalingi




 
    
    
    
    
    
    
    
    


 

 

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